Le management inclusif : une posture qui transforme le travail
Le management inclusif est bien plus qu’un supplément de confort. Bien plus qu’une mode importée (et maintenant controversée) du monde anglo-saxon, ou qu’une injonction à « bien se comporter » dans les organisations. C’est une posture managériale essentielle pour faire face aux défis du monde du travail aujourd’hui : la diversité des équipes et le besoin urgent de recréer de la confiance, de développer des contextes qui permettent d’accueillir les singularités comme une richesse pour le collectif.
Le management inclusif est au-delà d’un titre ou d’une charte affichée au mur, c’est une manière d’être et d’agir au quotidien. C’est une personne qui choisit de se connaître, d’accueillir l’altérité, et de questionner ses propres biais pour libérer les potentiels autour de soi en tant que manager.
La connaissance de soi comme point de départ
Difficile d’accueillir l’autre si l’on n’a pas pris le temps et le soin de se connaître soi-même. Sinon, on pilote ses équipes avec un angle mort gros comme un camion. Et on s’étonne des conséquences…
La première étape du management inclusif consiste à explorer :
Ses valeurs : qu’est-ce qui me met en mouvement ? Qu’est-ce qui, au contraire, me crispe ?
Ses zones de confort et d’inconfort : suis-je plus à l’aise avec les personnes qui me ressemblent ? Pourquoi ? Quelle est mon histoire personnelle vis-à-vis des gens différents de moi ?
Ses réactions automatiques : est-ce que je coupe la parole et à qui dans mon équipe ? Est-ce que je valorise davantage celles et ceux qui parlent fort ou qui ont le même parcours que moi ? Plus vieille ? Trop jeune ? Trop de différence ? Parcours atypique ? Autre culture ? Autre origine ? Quand pour la dernière fois ai-je porté mon attention sur le vécu et les bagages des membres de mon équipe ?
La connaissance de soi n’est pas un luxe. C’est un garde-fou contre la tentation de projeter ses propres peurs ou croyances sur l’équipe, qu’il s’agisse de croyance limitantes ou ressources. Une ou un manager qui a conscience de ses forces et de ses fragilités, peut plus facilement créer un climat où chaque personne se sent légitime.
De la peur de l’altérité à la curiosité
L’altérité dérange. Elle questionne. Elle peut faire peur.
Peur de devoir sortir de ses habitudes, peur de perdre du pouvoir, du confort, des privilèges, peur aussi de se tromper, peur de devoir expliciter aux autres (direction, équipe) son choix.
Cette peur est aussi un signal. Elle indique qu’il y a là un territoire de développement.
Le management inclusif repose sur un basculement : transformer la peur de l’altérité en curiosité. Cela signifie :
Transformer l’inconfort en apprentissage.
Voir dans chaque différence une occasion d’élargir le champ de vision collectif.
Grandir soi-même et faire grandir les autres.
Explorer avant de juger.
La curiosité est une compétence managériale, un muscle à entraîner : écouter avant de juger, accueillir avant de classer.
Déjouer les biais cognitifs
Nos cerveaux sont programmés pour aller vite. Pour survivre, ils catégorisent, généralisent, associent. Résultat : les biais cognitifs nous traversent tous et toutes, et influencent nos décisions sans que nous en ayons conscience.
Exemples :
Biais de similarité : nous faisons plus confiance aux personnes qui nous ressemblent.
Biais de confirmation : nous retenons surtout les informations qui confirment nos croyances.
Biais de genre ou d’âge : nous supposons que certaines tâches conviennent mieux à tel profil plutôt qu’à tel autre.
Le management inclusif n’élimine pas ces biais (c’est impossible), il permet de les reconnaître et les neutralise. Comment ?
Quelques pistes :
En prenant un temps de recul avant de décider.
En confrontant ses intuitions avec des faits.
En sollicitant des regards différents, surtout quand une décision engage l’avenir d’une personne ou d’une équipe.
Le courage, ici, c’est de dire : « Je sais que j’ai des biais, je fais le choix de ne pas les laisser guider mes décisions. »
Une posture quotidienne, plus qu’un geste symbolique
Le management inclusif se joue dans les détails du quotidien, et au-delà des grands discours. Quelques exemples :
Réunions : distribuer la parole, inviter explicitement les personnes les plus silencieuses à s’exprimer.
Feedback : donner un retour qui reconnaît à la fois la contribution et le potentiel, sans tomber dans les stéréotypes.
Décisions : se demander « Qui n’est pas autour de la table et devrait l’être ? »
Langage : adopter une communication claire, accessible, non excluante, donc inclusive.
Recadrage : intervenir face à une remarque discriminante, avec fermeté.
Ce sont ces gestes répétés qui, mis bout à bout, construisent une culture de confiance.
L’impact : performance et engagement
Pourquoi s’engager dans cette posture, au-delà de l’éthique ?
Parce que les faits sont là :
Les équipes inclusives prennent de meilleures décisions, et deux fois plus vite.
Elles innovent davantage, car les points de vue multiples s’entrechoquent et ouvrent des pistes nouvelles.
Elles retiennent mieux les talents, car chaque personne se sent reconnue pour ce qu’elle est et ce qu’elle apporte.
Le management inclusif est une posture dans les actes. Elle permet de créer les conditions pour que chaque personne ait envie d’apporter sa singularité. Et c’est précisément cette addition de compétences qui construit des organisations capables de se réinventer
Un chemin, plus que la recherche de la perfection
Développer un management inclusif ne demande pas forcément d’être irréprochable en toutes circonstances. C’est surtout d’accepter d’être en chemin : d’avoir de l’attention à soi, de l’ouverture aux autres, de reconnaître ses erreurs et d’avoir envie d’apprendre.
Le courage du leadership inclusif, c’est de vivre ensemble deux vérités :
Nous avons toutes et tous des biais, des peurs et des angles morts.
Nous avons aussi toutes et tous la capacité de les dépasser, en cultivant la curiosité, l’humilité et le respect. Et peut-être aussi l’amour de l’humain, donc de l’autre dans toutes ses différences.
Un geste après l’autre…
Le management inclusif est une posture fondamentale pour répondre aux défis actuels du travail : diversité, complexité, quête de sens recherche et fidélisation des talents.
Il commence par la connaissance de soi, s’incarne dans la curiosité envers l’autre, s’affine par la conscience des biais, et se déploie dans des gestes quotidiens qui transforment la culture d’équipe.
Il ne s’agit pas de viser la perfection, mais de faire le choix, jour après jour, d’accueillir l’altérité et d’en faire un levier d’intelligence collective.
Un ou une manager qui renforce la diversité et l’inclusion, c’est une personne qui inspire, qui ouvre des chemins, et qui rend possible la contribution de toutes et tous. Sans chichis. Avec élan, vulnérabilité et humilité.