« On a toujours fait comme ça ! »… et c’est bien ça le problème !

Imaginez. Vous êtes en réunion, votre cerveau en ébullition. Vous lancez votre idée. Simple, efficace, prête à transformer un vieux process pour gagner en efficacité. Et là, un silence pesant. Quelqu’un, bras croisés, soupire avant d’asséner.

Le missile de Monique, 50 ans, « On a toujours fait comme ça ! » est arrivé à destination.

Fin de la discussion. Fin de l’innovation. Fin de votre envie de vous impliquer.

C’est l’argument de la flemme, de la frousse, des allergiques au changement. C’est l’argument, parfois, soyons honnête, d’un peu tout le monde. Mais pourquoi cette phrase est-elle si destructrice ? Et quelle peur se cache derrière ce blocage à l’innovation ?

Déjà, cette phrase évite toute réflexion et remise en question. Elle vous fait passer du « Et si on tentait autre chose ? » à « Non merci, ça m’oblige à réfléchir et à me demander pourquoi je n'ai pas eu cette idée aussi », le tout en une réplique.

Alors mesdames et messieurs, veuillez applaudir chaleureusement… la peur de l’inconnu ! Hip hip hippp ! Car si on fait différemment, on prend un risque. Et qui dit risque dit responsabilité. Alors, mieux vaut rester dans le confort d’une médiocrité familière que de s’aventurer vers l’inconnu, quand bien même une petite voix nous dit que ce serait peut-être mieux.

La tyrannie du « on a toujours fait comme ça » dans le monde du travail

C’est le mur invisible qui empêche de développer l'innovation et la transformation, et c'est, encore trop souvent à tous les étages des organisations.

Pourquoi remplir des documents en trois exemplaires alors qu’un mail suffirait ? Parce qu’on a toujours fait comme ça.

Pourquoi tenir des réunions où tout le monde s’ennuie mortellement alors qu’un simple message Teams ferait l’affaire ? Parce qu’on a toujours fait comme ça.

Pourquoi continue-t-on à promouvoir des managers toxiques alors qu’on sait que ça ruine l'efficacité des équipes ? Vous connaissez la chanson.

Le pire, c’est que ce mantra est si puissant qu’il agit comme une camisole mentale. Même celles et ceux qui savent qu’il faut changer finissent parfois à capituler. L’habitude devient une prison. Le résultat ? La stagnation, voire la régression. Et dans un monde qui bouge tellement vite, rester immobile, c’est prendre le risque de s’effondrer. Les histoires de Kodak, Nokia ou Blockbuster sont intéressantes….

Pourquoi notre cerveau adore la facilité ?

Le problème ne vient pas uniquement du « c’était mieux avant ». La vérité, vous le savez aussi, c’est que notre cerveau est un flemmard de nature. Il adore l’efficacité énergétique et privilégie les chemins neuronaux déjà tracés plutôt que d’en créer de nouveaux. Concrètement : il est programmé pour préférer la routine. Plus c’est familier, moins il doit réfléchir. Et moins il réfléchit, moins il se fatigue. C’est l’économie d’énergie version neurones. C'est sympa sur le papier comme processus écolo hein ?

Daniel Kahneman (prix Nobel d’économie) l’a prouvé : les personnes que nous sommes sont câblées pour éviter le changement, car notre cerveau perçoit l’incertitude comme une menace. Résultat : on préfère un système inefficace mais familier à une amélioration qui nous demande un effort cognitif et un nouveau regard sur soi-même. A l’heure où la planète brûle, nos cerveaux n’ont pas évolué d’un iota depuis des milliers d’années face à l’inconnu. Misère…

Les neurosciences montrent que l’amygdale, la région du cerveau liée à la peur, s’active à la moindre menace de changement, suscitant ainsi stress et résistance. C’est pas gagné pour la nouvelle idée en pleine réunion.

En clair : plus on perçoit le changement comme risqué, plus on s’agrippe au « on a toujours fait comme ça ». Un réflexe de survie, sauf que dans le monde professionnel, il nous empêche d’évoluer.

Alors, comment résister ?

La bonne nouvelle, c’est qu’il existe des antidotes. Ils s’appellent « Pourquoi ? » et « Et si ? ». Deux mots magiques. Et forcer la clarification, c’est déjà fissurer la routine.

Pourquoi fait-on comme ça ? Quelle est la raison d’origine ? Est-ce toujours pertinent ? Et si on essayait autrement ? Que risquons-nous vraiment ? Ces questions ne détruisent pas seulement le dogme, elles forcent aussi leurs adeptes à justifier leur position. Or, bien souvent, les personnes se rendent compte qu’elles n’en ont aucune. PS : personne ne dit que changer un process ou un management est simple. Ce n’est pas du YAKA. Mais feindre que tout va bien ne résout rien non plus.

En fait, la vraie résistance, c’est d’oser faire différemment. Prendre le risque du changement. Montrer par l’exemple que non, ce n’est pas parce qu’on a toujours fait ainsi que c’est la seule manière de faire. Le problème, ce n’est pas l’habitude. C’est de croire qu’elle est une fin en soi.

Des spécialistes agissent sur mandat (ou en interne) pour créer des espaces dans les entreprises qui renforcent la créativité et l’innovation. Le dialogue, les voix du terrain peuvent être un terreau fertile. Les meilleures approches sont celles qui intègrent les neurosciences et les facteurs émotionnels. La réussite est conditionnée à l’exemplarité de la direction et du management. Y a du job hein ?



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