Le leadership, c’est inné ? Et les licornes existent aussi ?
Fermez les yeux, visualisez.
Cette personne est charismatique et inspirante. Un homme.
Il a une vision claire et une détermination inébranlable.
Il sait motiver ses équipes, prendre des décisions difficiles et incarner des valeurs fortes : intégrité, courage, persévérance.
Son éloquence et sa prestance lui permettent de rallier les autres à sa cause, tandis que son autorité naturelle impose le respect.
On ne juge pas au physique mais, disons-le : il est O.B.G (objectivement-beau-gosse) !
Toujours stratège, il garde son sang-froid et guide son groupe vers le succès avec assurance et résilience.
Ah oui, son aura éclaire la pièce quand il entre. Et certain·es affirment qu’il ne transpire jamais.
Messieurs dames, si vous avez bien fait l’exercice, il est sous vos yeux : LE LEADER.
Amen.
Le leader-né, fantasme ?
C’est un mythe qui a la peau dure : certaines personnes seraient nées leader, avec un charisme naturel si puissant qu’elles seraient capables d’embarquer les foules dès la cour de récré. Les autres, eh bien… qu’elles restent dans l’ombre, à jamais condamnées à suivre les « véritables » meneurs et meneuses, you know.
Sauf que cette idée a autant de bases scientifiques que la théorie selon laquelle « Elon Musk est un extraterrestre ». Spoiler : on aimerait bien y croire (est-ce qu’on peut le renvoyer sur XÆ-12 Prime, svp ?), mais aucune preuve sérieuse ne l’appuie (malgré quelques PowerPoints douteux sur YouTube).
Des études montrent au contraire que le leadership n’est pas un don inné, mais un ensemble de compétences et de comportements qu’on peut acquérir : inspirer et savoir partager une vision, remettre en question le statu quo, collaborer efficacement… En d’autres termes, les leaders ne naissent pas, ils et elles se construisent. Ou, comme aurait pu le dire une grande dame : on ne nait pas leader, on le devient.
Le leadership : une compétence, pas une bénédiction divine
Si le leadership était inscrit dans l’ADN, on pourrait scanner un gène et déterminer d’emblée qui deviendra CEO et qui restera dans un open space à calculer des KPI toute sa vie. Adieu, gène-du-leadership !
En réalité, ce qui fait la différence, c’est l’expérience, les capacités d'apprentissage, l’adaptabilité et la capacité à écouter (oui, vraiment) et à savoir identifier les leviers de motivation des individus.
Les « grands leaders » ? Ce sont avant tout des personnes qui ont appris de leurs échecs, observé leur environnement, pris des décisions parfois foireuses avant d’en prendre des meilleures. Elles ont évolué, appris à gérer des crises, à se remettre en question. Bref, elles se sont construites. Et ça, c’est une bonne nouvelle : ça signifie que le leadership est un processus, pas seulement un trait de personnalité.
Pourquoi croire que le leadership est inné est dangereux
Déjà, parce que ça décourage celles et ceux qui n’ont pas d’emblée l’aura d’une Céline Dion. Ensuite, parce que ça entretient des biais : si on part du principe que seul un certain type de personne est taillé « pour diriger », on reproduit les mêmes erreurs (coucou la diversité de pacotille, où seules les individus qui rentrent dans le moule sont promus). Comme le souligne le psychologue organisationnel Tomas Chamorro-Premuzic, notre fascination pour les leaders confiants, extravertis, voire narcissiques, nous pousse à confondre charisme et compétence. Nous avons un problème de leadership non pas parce que nous ne savons pas identifier les bons leaders, mais parce que nous sommes attirés par les mauvais traits.
En entreprise, c’est un poison. Parce que ça veut dire qu’on ne mise que sur des profils qui « ont l’air » d’avoir du leadership plutôt que sur ceux qui le développent vraiment. Et ça pousse aussi certains et certaines managers à ne jamais se remettre en question, avec une auto-évaluation permanente de leur naturelle compétence (alerte égo XXL).
Bonne nouvelle : le leadership, ça s’apprend !
Oui, on peut apprendre à mieux communiquer, à prendre des décisions sous pression, à écouter plutôt qu’imposer, à gérer des conflits et à inspirer une équipe.
Pas de « don » magique requis, juste de la pratique, des erreurs et une bonne dose de remise en question.
Depuis plus d'une décennie, le développement personnel a envahi les formations continues sur le thème du Leadership avec un passage sur la Connaissance de soi. Quand cela est bien fait, cela permet de prendre conscience de soi et de ses angles morts. De développer une forme de lucidité sur sa posture et ses intentions, qui ont un impact sur l'organisation et les équipes. L’humilité ?
Ajoutons à cela de l’intelligence émotionnelle, une capacité à gérer l’incertitude et à créer un climat de confiance… hop, vous mettez tout ça dans la machine… bon leader ou bonne leader en devenir…